La Pêche & les Pêcheurs ( 4 )
Poissons et Pêcheries
Dans l’ensemble du bassin de l’Adour et des gaves, de nombreuses pêcheries. jalonnent les parcours, en plus des cantonnements des gaves avec de nombreux emplacements
de pêcheries-baros. Elles ont nom Sourrouille, Saouque, Gelez sur l’Adour; Port Lahiron, Arrieutort,
Bérenx, Peyret (ou Dussau) et Bimia sur les Gaves Réunis.
Quelques poissons des gaves et de l'Adour :
1 - Saumon atlantique , 2 - Truite fario , 3 - Vairon ( "chippe" ) ,
4 - Gardon , 5 - Ablette , 6 - Perche franche ,
7 - Brochet , 8 - Chevesne ( "cabot" ) ,
9 - Vandoise ( "Aubour" ) , 10 - Anguille , 11 - Sandre ,
12 - Silure glane , 13 - Black bass , 14 - Goujon ( "Trogou" ) ,
15 - Poisson chat , 16 - Perche arc-en-ciel ( "calicot-bass" )
L’éventail des variétés de poissons est assez étendu et mélange aux poissons autochtones tels truite, perche, brochet, esturgeon (créac), goujon, cabot, aubour, aussi bien les poissons anadromes (qui passent leur vie adulte en mer mais viennent pondre en rivière) que sont le saumon, la truite de mer, l’alose (coulac), la lamproie, que les poissons catadromes (qui pondent en mer et passent leur vie adulte en rivière) comme l’anguille. À ce tableau, viennent s’ajouter des poissons de mer qui s’adaptent à l’eau douce et remontent largement en rivière pour y passer une partie de leur vie, selon les saisons, comme le muge et la plie. À cette liste, alors que l’esturgeon va disparaître et d’autres espèces être mises à mal, viendront s’ajouter à la fin du XIXe siècle des espèces introduites de piètre qualité (et considérées depuis comme nuisibles) comme le poisson-chat et la perche arc-en-ciel (calicot-bass) qui heureusement, se cantonnent aux parties calmes adjacentes aux rivières (épis et barthes).
1 - Alose ( "Coulac" ) , 2 - Muge ou Mulet ( "Murlou" ) ,
3 - Esturgeon ( "créac" ) , 4 - Lamproie fluviatile
Depuis, l’introduction, à partir des années 1960, du sandre venu faire le bonheur des pêcheurs amateurs et professionnels, fut moins vécue comme un fléau (encore qu'il fut accusé pendant longtemps de la raréfaction du brochet, carnassier comme lui. C'est pourtant bien la rectification des berges et l'assèchement des zones humides qui fit disparaître les frayères naturelles du brochet), alors que la colonisation notamment de l’Adour, par le silure glane sera considérée, à la fin du XXe siècle, comme une calamité.
Les Saumons du Bimia
De tous temps, ce sont les saumons qui constituent l’attrait principal de tous les habitants des berges des Gaves. C’est donc aussi cette espèce qui paye un lourd
tribut de prélévements. Les livres de comptes des cantonnements des Gaves de Pau et d’Oloron nous indiquent par exemple que, pour l’année 1899 ce sont 15600 kg de saumons qui finissent dans les
filets des pêcheurs (dont 7260 kg pour les sept baros de MM. Larran).
En 1905, à un kilomètre environ en aval du pont de Peyrehorade, les Gaves réunis n’ont que 80 mètres de large sur un lit régulier de gravier, avec une
profondeur moyenne de six mètres. L’endroit idéal pour lancer le filet devant les saumons qui remontent vers les frayères ! Lors de la campagne de pêche de 1906 ce sont 818 saumons qui sont
capturés là totalisant un poids de poisson de 11834 livres, soir un poids moyen de 14,470 livres par poisson. De quoi faire rêver tous les amateurs d’aujourd’hui !
“La pêche du saumon est ouverte. Les barques avaient été ravaudées soigneusement, les filets réparés, les espoirs aiguisés et les bras en attente. La pêche est
ouverte, vivent les marins de Peyrehorade ! Et vogue le couralin ! Mais nos braves marins ne s’embarquent pas sans appeler sur eux et leurs filets, les bénédictions célestes. Le pasteur bénit
barques et filets. Cérémonie naïve et touchante. Les barques sont amarrées au quai ; les marins attendent, le béret à la main. L’un d’eux tient avec précaution l’assiette blanche remplie d’eau
bénite, où trempe le buis traditionnel.” (Chronique locale de l’Abbé Thibert, 1908)
Dans les années 1960, une équipe de pêcheurs de saumons
sur le gave, au Bimia (CP)
Et, ci-dessous, en 1972 au même endroit, une équipe a lancé le filet
et ramène un des derniers saumons qui seront pris
de la sorte à Peyrehorade. Photos L. P.
Le “Village” des Pêcheurs
Des cabanes s’érigèrent le long du chemin de halage, bâties par les pêcheurs professionnels, partie sur le domaine public, partie sur des terrains privés (et
submesibles !) Attendant leur tour de “lans” qui durait de 20 à 30 minutes, on y rencontrait les équipes venues des villages voisins qui se partageaient les cabanes.
“Cambronne” (Robert Belin d’Orthevielle), “Pempenne” (Adrien Cazaux de Port de Lanne), Duboué,
Marchand et Bousset de Sainte Marie de Gosse, pour le saumon d’été.
Ci-contre, les "barraques" sous les flots de la crue de 1952
Le “village” comportait huit barraques dans les années 1950. La barraque “Sallenave” ou “des
Lanots” (restaurant des matelots et buvette des promeneurs) était ouverte aux badauds du dimanche qui venaient voir les lans. Elle était déjà tenue dans les années 1930 par
Victoria Pouchiou et possèdait un “quillier”. Parfois, l’accordéon qui accompagnait “la java des grands coups de filet” informait les alentours de la
satisfaction des pêcheurs.
Il y avait aussi Jacky Robert, Pradères “Le Nègue”, Lapègue, “Isidore”,
“Maton”, Dupouy “Patiou” et “les trois canards”. En 1983, quelques unes, résistaient encore, hantées
par des nostalgiques, mais celle d’Henry Daugé, construite en 1902 n’était plus qu’un souvenir. Celle d’Alcide Novion, bâtie en 1933, “une cabane en bois
d’un mètre sur trois, à côté de la barraque Dartigoeytes” (Pierre Dartigoeytes et Alexandre Benquet dit “Chaho”), en 1932 et celle
de Jean Baptiste Lapègue et Joseph Lauzanas, en 1935, avaient été reprises par d’autres.
Dans les années 1970, les cabanes des pêcheurs,
sur le chemin de halage, achèvent de rotir au soleil couchant,
pour devenir poussière de souvenirs…
Photos Pierre Ichas
“Une barque remonte le courant, remorquée par deux hommes. Eh bien, qu’avez-vous pris ? - Rien du tout, Monsieur le Curé ; nous
n’avons pas de chance…
À la cale du saumon, une équipe secoue les dernières mailles du long filet et le plie en long sur la barque. Combien de saumons aujourd’hui ? - Pas un, monsieur le Curé ! Et notre équipe n’a
rien pris depuis huit jours… Quelques marins sont assis sur la crête du chemin de halage, d’autres jouent au bouchon en attendant que leur tour soit venu de lancer le filet.
Cependant, une autre équipe ayant jeté le filet et entouré d’un vaste cercle des flots du Gave, arrive à force de rames, saute de la barque et tire avec effort la corde qui amène le filet. Un
temps d’arrêt pour laisser le filet immense se ranger le long de la rive et hors du courant. À présent, les quatre marins, à l’œuvre ! Le filet arrive lentement, très lentement, et ne traîne que
des feuilles mortes” (Chroniques locales de l’Abbé Thibert, 1907)
Ci-dessus, vers "la Pêcherie", les filets sont mis
à sécher après chaque "lans".
Ci-dessous, au même endroit le couralin
de chaque équipe avec le filet prêt.
La Pêche à la Traîne
On pêche par équipes de quatre au moins, avec un couralin. Certaines sont formées de cinq ou six hommes pour permettre un repos hebdomadaire par roulement. Le saumon se pêche de janvier à juin, à la traîne : un immense filet, long de 160 mètres sur 7 ou 8 mètres de large, à mailles réglementaires de onze centimètres, bordé en bas d’un filin de boules de plomb, en haut d’un fil portant des rondelles de liège en surface.
Ci-contre, Gilbert MIREMONT
de Hastingues
avec deux beaux saumons
(indications de Francis Bergay)
Avec cette bande de filet, il faut constituer un barrage sur les deux tiers de la rivière, une nasse ensuite, et enfin une poche qui se refermera sur le poisson. Le pêcheur sur la berge, reçoit un bout du filet.
Ci-dessous, à droite sous le béret,
Marc PRADÈRES de Sames (indications de Francis Bergay)
Un deuxième homme tire l’autre bout vers la barque qui ferme la boucle. Alors, il faudra des renforts pour remonter le piège pesant. À la seule force des bras, l’équipe va haler la “traîne” à terre, laissant la place à une autre équipe, et ainsi tout au long de la journée.
“Voici les minutes de l’émoi professionnel […] soudain la poche devient houleuse; des remous trahissent la présence de quelque grosse pièce qui essaie de s’arc-bouter pour bondir par dessus le filin supérieur.” (F. Gaye)
Au temps de la pêcherie, les filets séchaient au vent tout au long du chemin de halage, formant un écran de mailles maintenant remplacé par des peupliers. Ils étaient ensuite pliés et
soigneusement rangés dans les cabanes, attendant le lendemain.
Ci-dessus, à droite sous le chapeau,
Robert BELIN d'Orthevielle (indications de Francis Bergay)
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